(Verdun, le 12 août 2020) Au cours des derniers mois, les élus de certains arrondissements avaient voté d’importantes protections aux locataires montréalais et au parc locatif. Dans le contexte d’une crise du logement, le projet de règlement verdunois du 2 juin 2020 aurait eu comme effet principal de protéger jusqu’à une vingtaine de ménages dans l’année à venir d’une éviction de leur logement, d’empêcher le retrait de ces logements du parc locatif, et du même coup d’empêcher la conversion de duplex en maison unifamiliales ou de triplex en duplex. De telles demandes de fusion de logements deviennent de plus en plus communes. Le CACV a salué cette avancée.
Ce changement réglementaire était retiré lors du conseil d’arrondissement extraordinaire d’hier après-midi « le temps de permettre à l’administration et aux élus de revoir la teneur des modifications souhaitées. » Dans sept autres arrondissements, des changements réglementaires similaires ont été proposés et celui de Verdun est le seul à avoir été retiré. Par exemple, dans l’arrondissement Sud-Ouest il est toujours prévu, entre autres, d’empêcher la fusion de logements dans les bâtiments de 3 logements et plus, tel qu’il était proposé à Verdun.
Le CACV rappelle que si les dispositions quant à la fusion de logements ne sont pas inclus dans la futur version du règlement, cela aura des effets graves sur plusieurs Verdunois. Nous intervenons chaque semaine auprès de personnes qui perdent leur logement et n’arrivent plus à se reloger à Verdun en raison du prix et de la rareté des logements. Le plus souvent, ces personnes sont âgées, ont des contraintes au niveau de la santé, ou sont des familles avec des jeunes enfants. Certains ont dû être placés dans de l’hébergement d’urgence au premier juillet afin d’éviter l’itinérance.
Montréal et surtout Verdun traversent la pire crise du logement depuis au moins 20 ans. Avec un taux d’inoccupation de 0.2% sur la terre ferme et 0.0% à l’Île-des-Soeurs, Verdun est bien en deçà des statistiques de 2005, ancienne année record au niveau du faible taux d’inoccupation, alors à 1,4% dans Verdun et le Sud-Ouest (voir référence 1). Les résultats d’une telle pénurie sur les locataires vulnérables de Verdun sont dramatiques: évictions, hausses de loyer importantes, harcèlement, etc.
La gentrification de Verdun progresse rapidement, avec des prix de loyer qui montent en flèche. Entre février et mai 2020, les appartements annoncés sur Kijiji et situés dans la partie centrale de Verdun (les codes postaux commençant avec H3N) avaient un prix moyen de 1295.05$ par mois. Pour des 4 et demi dans ce secteur, seulement 20 annonces sur 241 avaient des loyers de moins de 900$ par mois (voir référence 2). De plus, nous remarquons en plus que loin d’être des « perles rares », les logements les moins chers ont souvent des problèmes de salubrité ou sont annoncés comme étant de 4 et demi malgré qu’ils n’aient pas deux chambres fermées.
En plus de l’importance de protéger des locataires contre la fusion de leur logement, les changements réglementaires proposés le 2 juin 2020 avaient d’autres dispositions fort pertinentes. Un encadrement de la subdivision des logements permettrait de protéger des locataires de certains tactiques de réno-éviction, par lequel des bâtiments se font vider de tous leurs locataires. Nous avons été témoins d’avis de subdivision dans plusieurs bâtiments et nous sommes en contact avec des familles qui auraient perdu leur logement si les changements réglementaires n’avait pas été votés.
Si nous sommes conscients que la plupart des propriétaires sont de bonne foi dans leurs désir de fusionner des logements afin d’habiter dans un plus grand logement, nous remarquons que d’autres en revanche prétextent une telle option afin d’évincer des locataires pour des raisons de profit.
Les changements proposés le 2 juin dernier comportaient aussi des dispositions sur la conversion des logements locatifs en condominiums (copropriété divise). Nous rappelons qu’en pleine crise de logement, il est fort pertinent de procéder à cette interdiction déjà adoptée dans d’autres quartiers. Les protections prévues pour les rares maisons de chambre restantes à Verdun doivent aussi à notre avis être réintroduites dans la prochaine mouture du changement réglementaire.
Dans le contexte des changements climatiques ainsi que pour d’autres raisons, il faut aussi tenir compte de la densité. L’augmentation du nombre de maisons unifamiliales via la fusion de logements va à l’encontre d’importants critères de durabilité. Malgré que nous ayons d’autre part le défi d’un manque de grands logements pour familles, la fusion de logements n’est pas une solution viable.
Nous sommes conscients que le règlement aurait dans sa forme originale entraîné des coûts ou aurait limité les options de personnes qui ont le projet d’habiter sur deux étages d’un duplex ou d’un triplex. Nous rappelons cependant que pour ceux qui disposent d’un tel privilège, des alternatives existent. Pour les locataires évincés au contraire, les conséquences peuvent être graves et sont parfois désastreuses.
Contact :
Steve Baird, organisateur communautaire, 514 769-2228, poste 102
Références :
1 – Société canadienne d’hypothèques et de logement, Rapport sur le logement locatif (automne 2005 et automne 2019), RMR de Montréal et données du Portail de l’information sur le marché de l’habitation.
2 – Enquête du RCLALQ ayant analysé 61 000 annonces au Québec entre février et mai 2020. Calcul du CACV pour ceux ayant des codes postaux H3N.
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